« La Belle et la Bête »

09 Août 2022

Les contes merveilleux
La Belle et la Bête

Ce conte que vous pensiez connaître…

Qui a écrit « La Belle et la Bête » ? Les frères Grimm, Charles Perreault, Walt Disney? Si vous pensiez avoir la réponse à cette question ici, détrompez-vous, on ne l’a pas. Les contes merveilleux sont tellement anciens qu’on ne sait pas qui les a inventés. Ils existaient bien avant d’être mis sur papier, transmis de bouche à oreille. Ça vous étonne? Ce n’est pas tout! Il existe en fait plusieurs milliers de versions de chaque conte, que l’on retrouve partout à travers le monde. La pantoufle de Cendrillon n’est pas toujours en verre; le petit chaperon rouge ne rencontre pas toujours un loup; Blanche-Neige ne se réveille pas toujours d’un baiser! Dans cette série d’articles, on vous révèle quelques anecdotes croustillantes sur les contes que vous pensiez connaître…

 

Une belle jeune femme à la robe de bal jaune doré…

On a tous des images en tête lorsqu’on entend « La Belle et la Bête » … que ce soit une belle jeune femme à la robe de bal jaune doré, une grande bête habillée en complet bleu, ou de la vaisselle qui parle! Cette vision n’est pas erronée, mais il s’agit en fait d’une seule des nombreuses versions de ce conte, celle popularisée par Walt Disney!

Une seule, oui! Parce qu’à ce jour, ce sont plus de 1 100 versions de « La Belle et la Bête » qui ont été répertoriées à travers le monde.

Dans certaines versions, la Bête est un ours, un serpent, un lion, un petit bonhomme vert, un porc, un loup, un monstre… Elle est parfois effrayante, parfois intrigante et parfois même séduisante!  Mais dans tous les cas, la Belle est contrainte de vivre avec elle et d’apprendre à l’aimer.

Les variantes se trouvent aussi au sein même de la structure du récit. Il y a des versions plus courtes, comme celle popularisée par Disney, qui se termine lorsque la Belle tombe amoureuse de la Bête et le prouve par un acte d’amour. Mais il y a aussi des versions plus longues, où la Belle, souvent courageuse et déterminée, a toute une quête à entreprendre!

Dans ces « versions longues », la Belle enfreint un interdit imposé par la Bête, ce qui a pour effet d’amener la Bête loin d’elle. La Belle doit donc entamer une longue quête, semée d’embuches, afin de retrouver la Bête disparue et pouvoir vivre à ses côtés!

Fait cocasse, des chercheurs s’étant penchés sur la classification des différentes versions du conte ont classé « La Belle et la Bête » sous la catégorie « La recherche de l’époux disparu ». On comprend lorsqu’on connaît la version longue… la quête de l’époux disparu est toutefois absente de la version de Disney! Ce dernier en aurait-il oublié un bout? Rassurons-le, il n’est pas le seul à avoir opté pour la version courte. Une autre version courte, écrite par Gabrielle-Suzanne de Villeneuve en 1740, et popularisée par Jeanne-Marie LePrince de Beaumont en 1756, sera largement diffusée au 18e siècle. C’est cette version qui inspirera bien des adaptations, notamment celle de Disney. En fait, il existe aujourd’hui tellement de variantes de cette version courte, que les chercheurs ont fini par en faire une sous-catégorie de « La recherche de l’époux disparu »!

 

La longue ou la courte, l’œuf ou la poule?

On ne saura jamais qu’elle version de « La Belle et la Bête » est venue en premier, puisque que le conte a probablement été véhiculé de bouche à oreille pendant des dizaines, voire des centaines d’années, avant d’être mis par écrit. Or, l’une des versions les plus anciennes répertoriées date du IIe siècle et nous ramène aux mythologies grecques et romaines. Il s’agit du récit « Amour et Psyché », qui figure dans le « Livre des métamorphoses » d’Apulée. Dans cette version, c’est nul autre que Cupidon, dieu de l’amour (ou Éros, chez les grecs), qui joue le rôle de la Bête.

 

Psyché, une princesse d’une grande beauté, s’attire la colère de Vénus (ou Aphrodite chez les grecs), déesse de l’amour. Cette dernière envoie son fils, Cupidon, l’atteindre d’une de ses flèches pour qu’elle tombe follement amoureuse d’un homme méprisable.

Or Cupidon est victime par erreur de sa propre flèche et tombe lui-même amoureux de la belle Psyché. Celle-ci se retrouve bientôt emportée dans son château, où Cupidon lui rend visite dans l’obscurité de la nuit, lui interdisant de chercher à connaître son identité. Psyché tombe amoureuse de son visiteur nocturne, mais ne peut s’empêcher, un soir, de tenter de l’observer en allumant une lampe.

Cupidon, furieux et blessé par l’huile de la lampe, s’enfuit chez sa mère, Vénus. Cette dernière le soigne et refuse de le laisser retrouver Psyché, dont il est toujours amoureux. De son côté, Psyché tente de retrouver son amant et se voit imposer par Vénus une série d’épreuves, qui la mèneront près de la mort. Cupidon réussit enfin à s’évader, et ranime Psyché in extremis de ses flèches.

 

Alors, vous avez reconnu la version longue? Une Belle contrainte d’aller vivre avec une Bête dont elle tombe éventuellement amoureuse (version courte), puis qui, en transgressant un interdit, éloigne d’elle la Bête, qu’elle retrouvera après de nombreux périples (version longue). Bon, entendons-nous, Psyché a eu la chance de tomber sur une « Bête » pas trop mal!

 

La conclusion… s’il y en a une…

« La Belle et la Bête » est donc un peu plus complexe que le conte que l’on connaît. On pourrait d’ailleurs pousser l’analyse plus loin, puisque la version courte n’est qu’une des sept sous-catégories du conte « La recherche de l’époux disparu »!  Mais question de ne pas vous donner de maux de tête, finissons avec une magnifique version appalachienne dans laquelle vous retrouverez sans doute des similitudes tant avec « La Belle et la Bête » de Disney qu’avec « Amour et Psyché » :

 

Une jeune femme est contrainte d’aller vivre avec un ours après que son père ait cueilli une rose interdite. En chemin, elle verse trois gouttes de sang sur la fourrure blanche de l’ours. Au château, elle apprend son secret : il est ours le jour, homme la nuit. Tous les deux tombent amoureux et ont trois enfants.

Un jour, la jeune fille demande à revoir son père. L’ours accepte, à condition qu’elle promette de ne pas révéler son secret. Sous la pression de sa famille, la jeune fille brise sa promesse. L’ours disparaît; elle part à sa recherche durant sept ans.

Elle le retrouve en plein jour, sous sa forme de jeune homme, mais il a perdu la mémoire et n’épousera que celle qui saura laver sa chemise tâchée de trois gouttes de sang. La jeune fille réussit, mais une autre femme en prend le crédit et épouse le jeune homme. La jeune fille va user de ruse pour réussir, par trois fois, à passer la nuit avec le jeune homme. Au bout de la troisième nuit, il la reconnaît et ils s’enfuient ensemble retrouver leurs enfants.

 

Alors, avez-vous l’impression de mieux connaître « La Belle et la Bête» maintenant? Ou peut-être est-ce plutôt l’inverse? 

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