C’est quoi, un conteur?
03 Mar 2021
Les arts de la parole, c'est quoi?
On l’a déjà dit : le conteur peut transmettre des contes, mais il peut aussi conter une légende, un récit de vie, ou même un roman! En fait, n’importe quelle histoire peut être adaptée et contée sur scène.
Mais alors, qu’est-ce qui distingue le conte d’autres formes d’art, comme le théâtre par exemple? C’est quoi, le travail d’un conteur?
C’est la même chose qu’un comédien non? Il apprend un texte, et il le rend sur scène.
Ou alors, peut-être qu’il écrit ses textes lui-même, comme un auteur?
En fait, ce n’est pas tout à fait ça.
Bien que certains conteurs, aujourd’hui, travaillent avec un support écrit, il existe une autre façon de travailler, plus proche de la tradition orale. Les conteurs qui utilisent cette approche ne fixent pas de texte sur papier, et n’apprennent rien par cœur!
Rappelons-nous que certaines histoires vieilles de plusieurs millénaires sont parvenues jusqu’à nous, grâce à des conteurs qui étaient en bonne partie analphabètes! C’est donc qu’elles peuvent tout à fait se transmettre sans jamais passer par l’écrit.
Alors, comment ça marche?
D’abord attiré par une histoire, le conteur travaille à en mémoriser les grandes étapes. Ensuite, il se l’approprie, c’est-à-dire qu’il visualise l’histoire jusqu’à ce qu’elle s’imprègne dans sa mémoire, comme un souvenir. Il s’agit d’un véritable travail de création, où l’histoire se colore de l’imaginaire du conteur, de ses expériences vécues, et où le conteur organise l’histoire à sa manière pour lui donner un sens qui lui est propre – il en refait le scénario, en quelque sorte. On dit parfois que le conteur n’apprend pas « par cœur » mais « par corps ». L’histoire qu’il apprend ainsi sera si profondément ancrée en lui, qu’il saura probablement encore la raconter, des dizaines d’années plus tard, même sans l’avoir « pratiquée » régulièrement. Comme le souvenir d’un événement qui lui serait réellement arrivé.
Lorsqu’un conteur crée sa propre version d’un récit, on dit qu’il s’approprie le récit parce qu’il le fait sien, en quelque sorte. Ce n’est pas rare qu’on puisse avoir l’impression, à l’entendre, qu’il l’a inventé lui-même! (Ce qui n’est ni tout à fait vrai, ni tout à fait faux.)
Le travail du conteur, c’est aussi (et surtout) de transmettre cette histoire à un public, de manière à ce que chaque spectateur voit à son tour apparaître des images dans sa tête. L’histoire se colore alors de l’imaginaire du spectateur; il la recrée lui aussi, à mesure qu’il l’entend. Le conteur doit donc s’affairer à raconter le récit de manière à faire apparaître ces images chez les spectateurs. Cela passe notamment par un langage concret, centré sur les sensations et sur l’action.
Ce qu’il faut aussi savoir, c’est qu’une histoire, dans l’esprit du conteur, reste toujours en mouvement. Elle peut bouger au gré des réactions du public, du lieu, des imprévus qui peuvent parfois survenir lors d’un spectacle; puisqu’il n’y a pas de texte, le conteur dispose d’une grande liberté pour s’adapter à chaque contexte. Bref, même si une manière de raconter l’histoire finit souvent par se cristalliser avec le temps, chaque représentation demeure unique… comme dans toute forme d’art vivant!
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